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Le Salut vient de Corse

9 décembre 2024 par
Gabriel
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En recevant un jour des jeunes français en audience le Pape François avait fait cette remarque déconcertante « On dit que la France est la fille aînée de l’Église… mais pas la plus fidèle, n’est-ce pas ? ». Le Pape Jean Paul II, qui avait dit sensiblement la même chose, avait justement voulu faire du réveil de la France un des axes majeurs de son pontificat. Le Pape François, quant à lui, semble poser un regard de lassitude sur cette fille un peu délurée.


Malgré cela, en 10 ans de pontificat, il est déjà venu à trois reprises en France alors qu’il n’a visité ni l’Argentine, ni l’Espagne, ni l’Allemagne. Pour se justifier il a dit qu’il ne visitait pas la France, il ne faisait que se rendre dans des villes situées en France à l’occasion de circonstances particulières. A Strasbourg il rendait visite au Parlement Européen, à Marseille, il venait à la rencontre des peuples de Méditerranée et à Ajaccio pour faire une conférence sur la piété populaire. 


Problème, il a accepté l’invitation de l’évêque de Corse mais il a refusé l’invitation du gouvernement français à venir inaugurer Notre Dame. Qui peut croire que cette décision serait complètement fortuite ? Rien ni personne n'aurait pu reprocher au Pape d’aller célébrer la résurrection flamboyante de la cathédrale emblématique de la France. Il y avait semble-t-il, pour François, plus de sens à se rendre à Ajaccio chez le Cardinal Bustillo. Le fait de s’y rendre la même semaine que l’inauguration de Notre Dame ne fait qu'en renforcer la signification.


Trois tentatives d’explication:

  1. La liberté du Pape: c’est un fait notoire, dans beaucoup de ses décisions, le pape, aime ne pas être là où on l’attend, c’est sa spécialité. Il aime s’aventurer sur des chemins nouveaux. En tant que jésuite et Argentin d’origine, ce ne serait pas le moindre de ses défauts. En réalité, il ne vit pas comme le dernier empereur de Chine derrière des hauts murs dans une prison dorée. Dans ses prises de décisions, il ne craint pas de faire parler sa tête autant que son cœur en faisant fi des conventions et autres obligations papales. ll aime montrer que même en étant Pape, il est libre.

    Refuser Paris, c’était donc faire preuve de liberté.


  1. Le role du chef de l’Eglise Catholique: Etre un vieux monsieur célibataire au sommet de la plus grande et la plus ancienne institution religieuse au monde confère, outre ses bienfaits spirituels, un angle de vue unique sur le court de l’histoire et l’urgence relative de certaines situations. Un pape ne craint pas de se faire renverser par une assemblée d’actionnaires, il peut envisager le temps long et s’affranchir de certaines contingences trop éphémères. Si cette position a parfois joué des tours à l’Eglise dans l’histoire, elle a eu sur les 150 dernières années des effets plutôt bénéfiques. Ce n’est pas pour rien si 4 des 10 derniers papes ont été béatifiés. Il serait trop long d’aller commenter toute l'histoire de l’Eglise récente, contentons nous de remarquer que les Papes ont plutôt servi d’aiguillon pour les chrétiens, prenant des positions allant à rebours des modes et ne craignant pas de renouveler les pratiques pastorale et donner des repères aux Chrétiens chahutés par les changements de notre époque. En choisissant un déplacement en Corse plutôt que d’aller à Paris, c’est un signe fort qui était envoyé par le Vatican. Le signe le plus simple, qui est le plus évident c'est tout simplement que le Pape a voulu montrer que l’Eglise n’était pas une gardienne de vieille pierre, que l’évangile valait bien plus qu’une simple cathédrale, qu’être chrétien ce n’était pas préserver un héritage mais vivre d’un Dieu libérateur.

    Ne pas aller à l'inauguration de Notre Dame à Paris pour se rendre à un congrès sur la piété populaire en Corse, c’est préférer l’annonce de l’évangile aux chrysanthèmes.

  2. Une vision d’avenir: Pour un Pape le vrai sujet, outre le gouvernement temporel de l'Eglise, c'est d'arriver à ménager un chemin entre les forces contraires. L'Eglise catholique est monde immense, le Pape doit faire cohabiter d'un côté ceux qui veulent un retour à l'inquisition, aux croisades et la messe en latin et de l'autre, ceux qui veulent que le prochain pape soit un transgenre élu au suffrage universel. C'est là qu'intervient le cas Bustillo: simple religieux franciscain à Lourdes, il est choisi comme Eveque d'Ajaccio en 2021, une année plus tard, il est nommé Cardinal et voilà maintenant que le Pape décide de se rendre dans son diocèse, première fois qu'un souverain pontif va fouler le sol Corse. Comment expliquer une ascension aussi rapide ? Certes Bustillo est Espagnol d'origine, il parle la même langue que le Pape, oui il est franciscain, et il s'appelle François mais cela ne suffit pas à faire de lui tout d'un coup la coqueluche du Vatican. La raison vient probablement du livre qu'il a publié 6 mois avant d'être nommé Eveque La vocation du prêtre face aux crises. Dans ce livre, il donne des intuitions très éclairantes sur le rapport de l'Eglise et des prêtres au monde moderne. Le supérieur des franciscains à Rome se trouve être un argentin il présente l'ouvrage au Pape qui est tellement emballé qu'il décide d'offrir ce livre à toutes les prêtres du Diocèse de Rome et lui propose de devenir Evêque…Depuis ce moment, la parole de Bustillo ne cesse de raisonner dans les médias catholiques, dans les médias, sur internet. Derrière sa voix douce, son léger bégaiement, ses mots simples, il est en train de révolutionner la façon qu'à l'Eglise d’être au monde.

    Ce voyage du Pape François chez son frère de 30 ans son cadet n'est pas anodin. Non seulement il se reconnaît en lui, mais il voit dans les intuitions développées par Bustillo autant de pistes à explorer pour l'Eglise empêtrée dans la sécularisation. 


En 1936, Marthe Robin avait confié cette prophétie au Père Finet:


« La France tombera bas, très bas, plus bas que les autres nations, à cause de son orgueil et des mauvais chefs qu'elle se sera choisis. Elle aura le nez dans la poussière. Alors elle criera vers Dieu, et c'est la Sainte Vierge qui viendra la sauver. Elle retrouvera sa mission de fille aînée de l'Église et enverra à nouveau des missionnaires dans le monde entier. »


La France n’est peut être pas la plus fidèle des filles de l’Eglise mais sa longue histoire chrétienne suivie par sa longue période de sécularisation l’a rendue non seulement résiliente mais aussi inventive. A l’image du Bustillo, l’Eglise qui en France n’a pas dit son dernier mot. En 2024, plus de 7000 adultes ont été baptisés, c’est deux fois plus qu’un 2021.


Sans aller jusqu’à dire que Bustillo sera nécessairement le successeur du Pape François, ce qui serait totalement ridicule car impossible à prévoir. Ne pas aller à Notre Dame pour le Pape, ce n'est pas un affront fait à la France ou un pied de nez à l'Église de France, c'est plutôt une graine posée pour l'avenir, comme un testament. Le synode est terminé, il a publié une dernière encyclique, le pape a aujourd’hui 87 ans, c’est l’un des plus vieux pape en exercice. Il va trés calmement terminer l’année jubilaire, se rendre à l’invitation du patriarche de constantiniple à nicée. Il pourra alors partir vivre une retraite bien méritée probablement en Argentine. Bref, il faudra être attentif aux gestes posés par le pape François tout au long de l'année 2025. Cette petite escale en Corse et les quelques autres signes qu’il va poser cette année auront pour lui valeur de testament et seront sans doute à interprêter comme des gestes prophétique. Seul l’avenir le dira. 


Gabriel 9 décembre 2024
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